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De la prescription de l'action en nullité du mariage

Civil - Personnes et famille/patrimoine
24/09/2019
Les juges du fond ne peuvent relever d’office la prescription trentenaire, même d'ordre public, de l’action en nullité du mariage prévue à l’article 184 du Code civil.
15 ans après leur mariage à Paris, un couple, de nationalité française, dépose une requête en divorce. Puis, l’époux soutenant avoir découvert l’existence d’un précédent mariage de sa femme célébré à Las Vegas en 1981, l’assigne en nullité de leur mariage pour bigamie. 

L'époux est débouté par les juges du fond et la cour d’appel prononce la nullité du mariage célébré en 1981.
Il se pourvoit alors en cassation arguant que la recevabilité d’une action en nullité du mariage pour absence de consentement se prescrit par trente ans à compter du jour de la célébration du mariage et qu’en matière d’état des personnes, les fins de non-recevoir ont un caractère d’ordre public. Ainsi et selon lui, la cour d’appel, qui a prononcé la nullité du mariage célébré en 1981, soit plus de trente après sa célébration, sans relever d’office la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action en nullité, a violé les articles 146 et 184 du Code civil, ensemble les articles 122 et 125, alinéa 1er, du Code de procédure civile. Il avançait également que la cour d’appel a, aux regards des articles 146 et 184 du Code civil, privé sa décision de base légale dès lors qu’elle n’a pas précisé quel but étranger au mariage avait pu être recherché par les époux à Las Vegas, ni recherché quelle était l’intention des époux au moment de la célébration de ce mariage.

La Cour de cassation rejette son pourvoi. Elle juge d’abord qu’aux termes de l’article 2247 du Code civil, les juges ne peuvent suppléer d’office le moyen résultant de la prescription. Elle précise ensuite que cette règle s’applique même lorsque la prescription est d’ordre public. Il en résulte ainsi que les juges du fond ne pouvaient relever d’office la prescription trentenaire de l’action en nullité du mariage célébré en 1981, prévue à l’article 184 du Code civil.

Par ailleurs, la Haute juridiction souligne que le consentement à mariage des époux relève de l’appréciation souveraine des juges du fond. Rappelons que conformément à l'article 202-1 du Code civil : « quelle que soit la loi personnelle applicable, le mariage requiert le consentement des époux, au sens de l'article 146 et du premier alinéa de l'article 180 ». Or, les juges du fond ont, en l’espèce, souverainement déduit que le consentement à mariage faisait défaut. Ils ont, en effet, relevé que l’épouse « avait présenté la cérémonie à Las Vegas à ses amis comme un rite sans conséquences, que le voyage n’avait pas eu pour but ce mariage puisque les bans n’avaient pas été publiés, que [le couple] n’avaient entrepris aucune démarche en vue de sa transcription à leur retour en France, qu’ils n’avaient pas conféré à leur enfant le statut d’enfant « légitime » puisqu’ils l’avaient reconnu, sans aucune allusion à leur mariage dans l’acte de naissance, et qu’ils avaient tous deux contracté des unions en France après ce mariage ». Le moyen du requérant n’est donc pas fondé.
Source : Actualités du droit