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Parasitisme : prise en considération du prestige et de la notoriété acquise de la dénomination sociale et du nom commercial

Affaires - Droit économique
08/08/2018
Afin de caractériser un acte de parasitisme, le prestige et la notoriété acquise de la dénomination sociale et du nom commercial de la société lésée doivent être pris en compte. Tel est l’un des enseignements d’un arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 10 juillet 2018.
Pour rappel, le parasitisme consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis.

En l’espèce, une holding avait apporté l'activité champagne à une filiale. Celle-ci était titulaire de la marque dénominative française « Taittinger ». Dans le cadre de la cession de la holding, il était notamment prévu que la famille Taittinger s'engageait irrévocablement au profit de l'acheteur, de la société holding ainsi que de ses filiales, à ne pas faire usage du nom « Taittinger », que ce soit à titre de marque de commerce ou de service, de nom commercial, de nom de domaine ou autre, pour désigner et/ou promouvoir tout produit ou service en concurrence avec tout ou partie de l'activité et/ou avec tout ou partie des produits ou services dérivant des opérations de l'activité. Après que la filiale a été revendue, Mme Taittinger a déposé la marque verbale française « Virginie T. » pour désigner divers produits, dont le champagne, créé une société et réservé le nom de domaine « www.virginie-t.com », qui héberge le site internet de la société ainsi que divers noms de domaine en « .com » et « .fr » assurant une redirection vers ce dernier, contenant les termes « Virginie Taittinger ». C’est dans ces conditions que la société titulaire de la marque dénominative française « Taittinger » a assigné Mme Taittinger, notamment, pour atteinte à la marque renommée « Taittinger », concurrence déloyale et parasitisme.

La cour d’appel (CA Paris, Pôle 5, ch. 2, 1er juill. 2016, n° 15/07856) a rejeté les demandes au titre du parasitisme, retenant qu'il n'est pas démontré en quoi l'adoption d'une dénomination sociale et d'un nom commercial en tant que tels traduiraient à eux seuls les efforts et les investissements, notamment promotionnels, de cette société.

La Cour de cassation retient au contraire qu'en matière de parasitisme, le prestige et la notoriété acquise, non contestés en l'espèce, de la dénomination sociale et du nom commercial de la société doivent être pris en compte. L'arrêt d'appel est donc censuré sur ce point (sur un autre aspect de l'arrêt, lire l'actualité du 08/08/2018 « Marque de renommée et nom patronymique : prise en compte de l’existence d'un juste motif à l'usage du signe »).

Par Vincent Téchené
Source : Actualités du droit