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Contrôles des accords de coopération : l’Autorité de la concurrence rend une seconde décision

Affaires - Droit économique
09/02/2021
L’Autorité de la concurrence a accepté les engagements présentés par deux distributeurs du secteur de la grande distribution à dominante alimentaire afin de répondre aux préoccupations de concurrence posés par un accord de coopération. Il s’agit de la seconde décision rendue par l’institution depuis l’entrée en vigueur de la loi Egalim.
En prononçant une seconde décision en moins de deux mois, l’Autorité de la concurrence semble pleinement utiliser les nouvelles compétences qui lui ont été accordées pour contrôler les rapprochements de centrales d’achat.

En 2018, le groupe français Carrefour et le groupe britannique Tesco ont conclu un accord de collaboration consistant notamment à organiser des appels d’offres communs, dont la conduite est assurée par l’un des deux distributeurs, afin de faire fabriquer des produits de marques de distributeurs (ci-après, MDD). À noter que cet accord portait sur plus de 130 familles de produits alimentaires et non-alimentaires.

Après avoir reçu communication de cet accord, et conformément aux dispositions de l’article L. 462-10 du code de commerce issues de la loi Egalim du 30 octobre 2018, l’Autorité de la concurrence s’est saisie d’office, dans un premier temps pour examiner les éventuelles atteinte à la concurrence de cet accord, puis dans un second temps en mesures conservatoires. L’instruction a permis d’identifier des risques d’atteintes à la concurrence, ce qui a conduit à la prise d’engagements par les deux entreprises afin de répondre aux préoccupations de concurrence de l’institution.

Les préoccupations relevées par l’Autorité étaient similaires à celles de la décision no 20-D-13 du 22 octobre 2020 relative aux accords de coopération conclu entre les groupes Auchan, Casino, Schiever et Metro (v. à ce sujet Contrôles des accords de coopération : l’Autorité de la concurrence accepte les engagements des distributeurs). Ainsi, et de la même manière, il est souligné que les conditions contractuelles défavorables pour les fournisseurs, leur fragilité, la diminution significative des ventes depuis plusieurs années et la pression accrue des distributeurs sont autant d’éléments susceptibles de diminuer la probabilité que les fournisseurs puissent exercer un pouvoir de marché compensateur face aux distributeurs. Cela pourrait à terme entrainer une baisse des capacités d’investissement et d’innovation des fournisseurs fragilisés qui ne seraient plus incités à demeurer sur le marché, et conduire également à une diminution du bien être des consommateurs.

Ces risques étaient d’autant plus préoccupants que les produits MDD concernés par cet accord sont fournis, pour une part significative, par des TPE et PME, entreprises moins susceptibles de supporter une dégradation des conditions d’exercice de leur activité économique que des structures plus importantes.

Pour remédier à ces préoccupations de concurrence, les deux distributeurs ont proposé des engagements qui ont été acceptés par l’Autorité dans sa décision du 17 décembre 2020 :
 
  • exclusion de certains produits agricoles de l’accord (certains fruits et légumes, les plantes et fleurs d’intérieur, agneau) en provenance de l’Union européenne ;
  • limitation de la coopération pour 8 catégories de produits (correspondant pour Carrefour à 15% de parts de marché à l’achat par famille de produits) ;
  • ne pas exclure les petits fournisseurs du champ d’application de l’accord, leur permettant ainsi de répondre aux appels d’offres.

Ces engagements ont été pris pour cinq ans à compter de la date de la décision, ou jusqu’à la date à laquelle le volet MDD de l’accord sera résilié.
 
Pour aller plus loin
Sur l’information de l’Autorité de la concurrence en cas de création ou d’élargissement d’activité d’une centrale d’achat, voir Le Lamy droit économique, nos 4487 et s.
Source : Actualités du droit